Fraudes aux arrêts maladie : que peut faire l’employeur ?

En 2023, la fraude aux arrêts de travail a connu une hausse significative, d’après les statistiques de l’Assurance maladie. Cette situation soulève de nombreuses interrogations quant aux mécanismes mis en place pour endiguer ces pratiques d’arret maladie frauduleux.

Déclaration des arrêts de travail : état actuel et évolutions à venir

Un salarié, se trouvant dans l’impossibilité de travailler pour des raisons de santé, doit prévenir son employeur par tout moyen à sa disposition (SMS, mail, téléphone) et justifier son absence dans les délais impartis par sa convention collective, ou à défaut, sous 48 heures. Il doit par la suite transmettre les volets 1 et 2 de son arrêt de travail à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) et le volet 3 à son employeur. Toutefois, une télétransmission des deux premiers volets à la CPAM est envisageable, ne laissant au salarié que le volet 3 à remettre.

Pour contrer l’arret maladie frauduleux, facilité par les réseaux sociaux où l’on peut se procurer de faux arrêts de travail, l’Assurance maladie encourage les praticiens à privilégier la dématérialisation des arrêts. Si cette option n’est pas possible, un nouveau formulaire papier, plus sécurisé, sera obligatoire dès juin 2025. Il comportera des éléments spécifiques tels qu’une étiquette holographique et de l’encre magnétique. Autant d’éléments qui éviteront un arret maladie frauduleux.

arret maladie frauduleux

Contre-visite médicale : droits et responsabilités de l’employeur

Hormis dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, un employeur est en droit de solliciter une contre-visite médicale s’il verse une indemnité complémentaire à celle de la Sécurité sociale. Cette visite, effectuée par un médecin choisi par l’employeur, a pour but de confirmer si l’état de santé du salarié justifie effectivement son incapacité à travailler. C’est un premier élément important pour éviter un arret maladie frauduleux.

Depuis juillet 2024, le salarié est tenu de préciser :

  • Son lieu de repos s’il diffère de son domicile ;
  • Les horaires disponibles pour la contre-visite, dans le cas où il dispose de la mention « sortie libre ».

Si le salarié refuse cette contre-visite sans motif valable (comme un rendez-vous médical), la CPAM peut suspendre le versement de ses indemnités journalières après un délai de dix jours.

Renforcement des mesures anti-fraude

Face à la recrudescence de l’arret maladie frauduleux, l’Assurance maladie met en place divers outils pour intensifier le contrôle des arrêts de travail. Le recours aux arrêts dématérialisés permet de sécuriser les échanges entre le professionnel de santé et les différentes parties prenantes (employeur, CPAM). Par ailleurs, un formulaire papier renforcé sera progressivement instauré dès 2025, intégrant des éléments de sécurité comme des éléments holographiques.

Rôle de l’employeur et répercussions pour le salarié

Les employeurs disposent du droit de contrôle sur les arrêts de travail, notamment par la possibilité de demander une contre-visite médicale pour vérifier la validité de l’arrêt. En cas de doute, une expertise médicale peut également être requise. Si le recours à une arret maladie frauduleux est avéré, le salarié risque la suspension de ses indemnités journalières, des sanctions disciplinaires, pouvant aller jusqu’au licenciement, voire des poursuites judiciaires.

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Le recours à un détective privé par l’employeur.

Un employeur peut, sous certaines conditions, avoir recours à un détective privé pour vérifier la réalité d’un arrêt maladie s’il estime qu’il s’agit d’un arret maladie frauduleux. Cependant, il est important de respecter un certain cadre légal pour que cette démarche soit légitime et ne porte pas atteinte aux droits du salarié.

Cadre légal et conditions à respecter :

  1. **Respect de la vie privée** : Le salarié, même en arrêt maladie, bénéficie d’une protection de sa vie privée. Le détective ne peut pas enquêter dans la sphère privée du salarié (comme son domicile ou ses activités privées en dehors du contexte professionnel). Cependant, les activités qui se déroulent dans l’espace public peuvent être observées.
  1. **Proportionnalité** : Le recours à un détective privé doit être justifié et proportionné. Si l’employeur a des raisons sérieuses de penser que le salarié profite d’un arret maladie frauduleux pour exercer une activité incompatible avec l’arrêt ou pour frauder, il peut engager un détective. Toutefois, cette mesure doit être proportionnée aux enjeux.
  1. **Preuve d’une activité contraire à l’arrêt maladie** : L’objectif de l’employeur est souvent de démontrer que le salarié exerce une activité incompatible avec son arrêt maladie (par exemple, un salarié en arrêt pour des problèmes de dos qui exerce une activité physique intense). Les preuves recueillies peuvent être utilisées pour justifier une sanction disciplinaire ou un licenciement. Il est également fréquent que le salarié bénéficiant d’un arret maladie frauduleux exerce une activité non déclarée en concurrence directe avec son employeur.

Ce que dit la jurisprudence :

Les tribunaux admettent, dans certains cas, l’utilisation des services d’un détective privé. Par exemple, si l’employeur découvre, grâce à l’enquête, que le salarié travaille pour une autre entreprise alors qu’il est censé être en arrêt maladie, cela pourrait justifier un licenciement pour faute grave.

Toutefois, la prudence est de mise, car des preuves obtenues de manière déloyale ou portant atteinte à la vie privée du salarié risquent d’être rejetées par les juges. De plus, si l’employeur utilise les services d’un détective privé de manière abusive ou disproportionnée, cela pourrait entraîner des sanctions à son encontre.

L’employeur peut donc recourir à un détective privé dans le cadre d’une suspicion d’arret maladie frauduleux, à condition de respecter les droits du salarié et de ne pas violer le cadre légal. Les preuves recueillies doivent être pertinentes et proportionnées à l’objectif poursuivi.

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